Jurisprudence de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA) de l'OHADA
CCJA, 3e Chambre, Arrêt n° 32 du 08 décembre 2011, affaire : Société Congolaise Arabe Lybienne de Bois dite SOCALIB c/ Collectif des travailleurs de la SOCALIB, Juridis périodique n° 105, janvier-mars 2016, pp. 113-121
MOHO FOPA Eric Aristide, note sous CCJA, 3e Chambre, Arrêt n° 32 du 08 décembre 2011, affaire : Société Congolaise Arabe Lybienne de Bois dite SOCALIB c/ Collectif des travailleurs de la SOCALIB, Juridis périodique n° 105, janvier-mars 2016, pp. 113-121.
Procédures collectives d’apurement du passif - saisine d’office - informations recueillies à l’occasion d’un procès intenté par le collectif des travailleurs - décision ultra petita (non) - offre de concordat - appréciation par le juge - nécessité de l’avis préalable d’un expert (non).
faits et procédure
En l’espèce, à cause de nombreuses difficultés techniques, la SOCALIB a mis en congé technique une partie de son personnel dans l’attente d’une amélioration de sa situation. Face à la stagnation des difficultés de l’employeur, et fatigué d’attendre l’amélioration des conditions des salariés mis en congé, le Collectif des travailleurs de la SOCALIB intente, le 12 mai 2004, une action en justice contre cette dernière. À cet effet, il saisit le Tribunal de grande instance de Ouesso pour le constat de l’abandon des employés depuis mars 2003, la cessation pour la même période de temps de l’activité de l’entreprise et l’arrêt du paiement des salaires depuis août 2003. De même, le Collectif des travailleurs sollicite que le Tribunal contraigne la direction générale de la SOCALIB à leur payer les arriérés de salaire et tous leurs droits sous huitaine.
Le Tribunal saisi passe outre la demande du Collectif des travailleurs pour plutôt constater la cessation des paiements de la SOCALIB et prononcer la liquidation de ses biens, à la grande surprise de cette dernière. C’est pourquoi la SOCALIB interjette appel de la décision rendue en instance devant la Cour d’appel d’Owando, malheureusement sans succès. Déterminée, la SOCALIB se pourvoi en cassation devant la CCJA. Elle fonde son recours sur plusieurs motifs.
D’abord, elle reproche à la Cour d’appel de n’avoir annulé le jugement querellé que relativement au grief d’après lequel le tribunal n’a pas donné à la SOCALIB la possibilité de défendre ses intérêts. Pourtant, la société demandait l’annulation totale de la décision pour défaut de qualité des demandeurs. Ensuite, elle reproche à la Cour d’appel d’avoir, à l’instar du Tribunal de Ouesso, statué ultra petita en prononçant la liquidation des biens alors que la demande initiale visait le paiement, sous huitaine, des droits et arriérés de salaire des travailleurs. Enfin, elle reproche à la Cour d’appel de n’avoir pas initié une enquête préalablement à la prise de sa décision et d’avoir décidé de la liquidation des biens sans requérir l’avis d’un expert sur sa situation financière.
Observations:
L’une des prérogatives les plus importantes reconnues au juge en matière de procédures collectives d’apurement du passif en droit OHADA est le pouvoir d’auto saisine. À cet effet, il est expressément accordé au juge d’instance la possibilité de déclencher l’action devant aboutir à la procédure collective. De même, la Cour d’appel, au-delà du contrôle de cette initiative du juge d’instance, peut aussi se saisir d’office, ainsi que le laisse entrevoir la CCJA dans la présente cause.
Le droit des entreprises en difficulté est un droit suffisamment technique. Sa technicité peut conduire certains de ses aspects les plus importants à échapper à l’entendement du juge. C’est pourquoi la loi lui reconnaît le pouvoir de confier certaines missions spécifiques à un expert. Contrairement à la prétention de la demanderesse en l’espèce, ce pouvoir est purement discrétionnaire dans les procédures faisant suite à la cessation des paiements.
Toutefois, il peut être utile pour le juge qui s'est saisi d'office d'un cas de cessation des paiements de recourir à l'expert de l'article 32 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif pour davantage conforter sa conviction...
Pour plus de détails, lire Juridis périodique n° 105, janvier-mars 2016, pp. 113-121